mercredi, avril 24, 2013

[Carnet de bord] _Une nouvelle croisée de chemins.

[Carnet de bord]

Une nouvelle croisée de chemins.
Dans ma peinture je ne cherche pas au demeurant la "belle image", esthétisante, conçue pour plaire.  Aller au fond, creuser, la différence naît hors la conscience.  La beauté est ailleurs. Accouchée de la lumière souvent.
Et parfois de l’enfer, antithétique sage-femme, par intermittence.

Bien. Là, alors que j’achève ma dernière toile, une vague injonctive de remise en question me déferle dessus, une fois de plus :
Je dois à nouveau aller plus loin, quitter une certaine zone de confort, à peine acquise à force de persévérance. Et, chose plus complexe pour moi, la conscience de devoir sur ma toile, transgresser davantage ce poumon de l’âme qu’est la pudeur, jouer plus vaillamment avec ses reliefs, ses parois abruptes et ses précipices, taquiner encore ses limites.
La vie quotidienne permet justement et par respect, la présence amicale de cette douce politesse de l’âme, retenue de l’intime. 
La toile, elle, pour tendre vers l’élévation et le partage, s’en nourrit, et l’exige en sacrifice pour mieux la dévoiler.

Il me faudra chercher encore plus loin l’honnêteté, et travailler au corps (à corps) mes énigmes, lustrer en dedans l’art perdu des secrets de l’être, paradoxalement seul matériau tangible, du personnel vers un universel.
Quel autre choix devant le monde de l’aujourd’hui, pour se concevoir à la fois hôte et voisin dignes, que de bâtir soi même de ses mains sa maison intérieure ?

Mais voilà … Placer patiemment ses marques pour mieux les quitter, en se remettant inlassablement en danger, tu parles d’une bénédiction !

Un cap insensé à tenir, me répondrez-vous : nous sommes dans un monde insécure où il faut bien vivre, manger, se protéger soi avant tout, savoir prendre les vents dominants, se placer, caresser les petites vanités revigorantes, et savoir capitaliser.
Vraiment ? Peut être assistons-nous aux limites du système...

En vieux singe, je ne connais que trop bien les ficelles de ces vents-là. Quant à la création, elle s’asphyxie de ces générations spontanées, clonées de vide, et cyniques en diable. L’écume de cette surface infertile ne me nourrirait pas (si tant est qu’elle puisse jamais nourrir personne, au delà de l’avoir ou du paraître), la sève est ailleurs et le temps précieux.

Car justement il faut vivre. Maintenant, aujourd’hui, demain. En soi, et vers les autres. Proprement et avec dignité.
Et pour l’artiste en moi, chercher dans l’inconscient - espace de tous les possibles, l’éveil à la conscience. Pour apprendre à marcher vers une pleine conscience, solidaire.
Pour faire sa part.